Impôt sur le bénéfice et actions propres

Depuis l'entrée en vigueur du droit comptable révisé en 2013, les rachats de propres droits de participation sont économiquement assimilables à une réduction de capital ou à une distribution aux détenteurs de parts. Le comité de la Conférence suisse des impôts ("CSI") était jusqu'à présent d'avis qu'indépendamment du traitement commercial, les propres actions étaient des valeurs patrimoniales et que les bénéfices ou les pertes comptables devaient donc être pris en compte avec incidence fiscale. Dans un arrêt récent (BGer 9C_135/2023 du 6 juin 2024), le Tribunal fédéral a désormais clarifié la manière dont les propres droits de participation doivent être traités en matière d'impôt sur le bénéfice.

Situation de départ dans l'arrêt du Tribunal fédéral du 6 juin 2024

La société A.SA est une holding cotée en bourse dans le canton de Zurich et a acquis ses propres actions. Après trois ans de détention, A.SA a remis les actions propres à ses collaborateurs et a comptabilisé la différence positive entre les coûts d'acquisition et la valeur d'attribution dans les réserves légales de capital, sans incidence sur le résultat, et l'a déclaré en conséquence dans sa déclaration d'impôt.

L'administration fiscale cantonale de Zurich a contesté ce procédé et a ajouté la différence positive au bénéfice imposable. Après l'échec de la réclamation de A.SA. et du recours devant le tribunal de recours en matière fiscale, le tribunal administratif de Zurich s'est rallié en fin de compte à la position défendue par A.SA. L'administration fédérale des contributions ("AFC") a fait recours contre cette décision auprès du Tribunal fédéral.

Question litigieuse et considérations du Tribunal fédéral

En droit commercial, les actions propres rachetées sont comptabilisées comme un poste négatif dans les fonds propres. Lors de la redistribution aux collaborateurs, ce poste négatif est à nouveau dissous. Conformément aux nouvelles dispositions légales, la différence entre le coût d'acquisition et la valeur d'attribution est comptabilisée dans les fonds propres, sans incidence sur le résultat.

Dans son recours, l'AFC a exigé une dérogation aux dispositions du droit commercial et donc une rupture du principe de l'importance déterminante. Dans sa motivation, l'AFC s'est référée à l'analyse de la CSI et a avancé l'art. 58, al. 1, let. c) LIFD comme norme de correction, selon laquelle les revenus n'ayant pas d'incidence sur le résultat doivent également être intégrés dans le bénéfice net imposable. En outre, l'AFC a souligné l'existence d'un lien de systématique fiscale entre l'impôt sur le bénéfice et l'impôt sur le revenu et impôt anticipé (art. 58, al. 1, let. c LIFD, art. 4a, al. 2 LIA ainsi qu'art. 20, al. 1, let. c LIFD).

La question centrale était donc de savoir si le produit de la réémission d'actions propres rachetées dans le cadre du programme de participation des travailleurs constituait son gain en capital imposable ou s'il devait être traité comme un apport de capital sans incidence fiscale.

Le Tribunal fédéral est d'avis que l'art. 58, al. 1, let. c) LIFD ne s'applique pas, car la réémission des propres actions ne génère pas de "rendement". En outre, il n'y a pas de valeur patrimoniale en droit commercial, raison pour laquelle on ne peut pas non plus parler de gain en capital lors de la réémission des propres droits de participation. Enfin, il a estimé que le lien entre impôt anticipé ou l'impôt sur le revenu d'une part et l'impôt sur le bénéfice d'autre part était trop faible pour rompre le principe de l'importance déterminante. Il s'agissait plutôt, lors de la réémission des actions propres, d'une opération d'apport de capital fiscalement neutre selon l'art. 60 let. a LIFD.

Conclusion

Cette décision a permis de clarifier une question de principe importante. Néanmoins, des questions non résolues subsistent en ce qui concerne le traitement fiscal des actions propres, notamment l'application du principe de l'apport de capital.