Mise à jour sur l'impôt minimum - introduction de l'impôt complémentaire international

Avec l'impôt national complémentaire (QDMTT), la Suisse a mis en vigueur au 1.1.2024 une partie du pilier 2 du projet OCDE/G20 sur la taxation de l'économie numérique.

En septembre 2024 , le Conseil fédéral a décidé d'introduire une partie de l'impôt complémentaire international avec l'Income Inclusion Rule (IIR) au 1er janvier 2025. Avec l'impôt international complémentaire, les bénéfices des filiales étrangères de groupes d'entreprises suisses sont notamment imposés en Suisse, pour autant que le groupe d'entreprises génère un chiffre d'affaires mondial d'au moins 750 millions d'euros. Le Conseil fédéral renonce jusqu'à nouvel ordre à l'entrée en vigueur du deuxième impôt complémentaire international, l'UTPR.

‍Sécurisationdes recettes fiscales en Suisse

Le peuple suisse ainsi que les cantons se sont déjà prononcés en été 2023 en faveur de l'introduction de l'impôt minimum OCDE/G20. L'introduction du régime OCDE/G20 vise en premier lieu à éviter que la Suisse ne renonce à des recettes fiscales au profit de l'étranger, ce qui doit être garanti d'une part par l'impôt complémentaire intérieur déjà introduit (QDMTT) et d'autre part par l'impôt complémentaire international prévu (IIR). Dans la mesure où les États membres de l'Union européenne (UE) et d'autres pays industrialisés importants appliquent globalement l'imposition minimale à partir de 2025, la Suisse peut désormais garantir, avec l'entrée en vigueur de l'IIR, que le substrat qui en résulte est imposé dans notre pays. En revanche, en cas de renonciation potentielle à l'IIR, d'autres Etats auraient pu, conformément aux dispositions en vigueur de l'imposition minimale de l'OCDE/G20, soumettre les bénéfices étrangers à l'imposition, notamment dans le cadre du deuxième impôt international complémentaire, appelé UTPR.

L'impôt minimum est lié à des incertitudes malgré des recettes fiscales supplémentaires

L'introduction de l'imposition minimale entraîne une charge fiscale supplémentaire pour les groupes d'entreprises concernés, ce qui peut nuire à l'attractivité de la place économique suisse, dans la mesure où, par exemple, les places concurrentes de la Suisse n'introduisent pas ce dispositif réglementaire. Néanmoins, le Conseil fédéral estime qu'une telle charge supplémentaire ou l'affaiblissement d'un avantage important de la place économique suisse qui en découle est acceptable du point de vue de l'économie suisse. En outre, selon le Conseil fédéral, il faut s'attendre à ce que le substrat fiscal national supplémentaire que la Suisse s'assurera, notamment avec l'entrée en vigueur prochaine de l'IIR, soit à nouveau disponible pour le renforcement de la place économique suisse. On pense ici à l'introduction de "Qualified Refundable Tax Credits", qui font actuellement l'objet de débats importants, par exemple dans les cantons de Zoug et des Grisons. Enfin, la décision du Conseil fédéral renforce la sécurité juridique en Suisse en protégeant les entreprises concernées d'une multitude de procédures fiscales dans les Etats appliquant l'UTPR.

L'estimation du potentiel de recettes de l'IIR est incertaine en raison de différents facteurs. Selon les calculs de la Confédération, les recettes supplémentaires en Suisse pourraient se situer entre CHF 500 millions et CHF 1 milliard. Selon la clé de répartition prévue par la Constitution, 125 à 250 millions de CHF reviendraient à la Confédération et 375 à 750 millions de CHF aux cantons.

Ces incertitudes ne proviennent pas seulement de l'estimation imprécise des recettes, mais aussi de la mise en œuvre peu claire des règles fiscales de l'OCDE à l'échelle mondiale. De nombreux États n'ont pas encore adopté les nouvelles règles. Les raisons en sont notamment l'incompatibilité avec les systèmes fiscaux existants ou le mécontentement vis-à-vis du projet OCDE/G20 dans certains pays. On pense ici en particulier aux pays en développement, qui souhaitent depuis peu influencer la politique fiscale mondiale en leur faveur dans le cadre institutionnel de l'ONU, ainsi qu'aux États-Unis. Cela augmente le potentiel de conflits internationaux, étant donné que différents pays ne peuvent ou ne veulent pas se mettre d'accord.

Pas de mise en œuvre de l'UTPR en Suisse

Comme il ressort de la décision du Conseil fédéral, l'impôt complémentaire international secondaire en aval (appelé "Undertaxed Payments Rule", UTPR) ne sera pas introduit pour le moment. Bien que la grande majorité des États membres de l'UE ainsi que le Royaume-Uni, le Canada et l'Australie envisagent aujourd'hui d'introduire un UTPR, probablement au 1er janvier 2025, le Conseil fédéral estime qu'une telle mesure est trop risquée par rapport au potentiel de recettes de l'impôt correspondant et que son application est également difficile sur le plan juridique. L'UTPR, en tant que mesure de repli, garantirait également l'imposition minimale des bénéfices qui ne sont soumis ni à une QDMTT ni à une IIR. Ainsi, dans ce cas, les bénéfices de filiales dans lesquelles une société suisse n'aurait pas de participation et pour lesquelles aucune société holding supérieure ne serait domiciliée en Suisse seraient en outre soumis à l'imposition en Suisse en cas de sous-imposition à l'étranger. Compte tenu de l'acceptation internationale ambiguë de cette règle, une renonciation provisoire à l'UTPR en Suisse semble donc justifiée selon le Conseil fédéral.

Conclusion

L'impôt complémentaire suisse (QDMTT), déjà introduit au 1.1.2024, qui garantit l'imposition minimale des groupes d'entreprises concernés en Suisse, doit être complété par l'impôt complémentaire international (IIR) à partir de 2025. Ce dernier vise en premier lieu à assurer une imposition minimale de toutes les unités commerciales d'un groupe d'entreprises auprès de la société mère supérieure, même si aucune imposition minimale n'est appliquée à l'étranger. Ces deux règles fiscales applicables en Suisse, qui découlent de l'imposition minimale de l'OCDE/G20, doivent se combiner pour augmenter la sécurité juridique existante pour les entreprises suisses et pour garantir que le substrat fiscal national ne s'écoule pas à l'étranger.

Des incertitudes subsistent toutefois quant à l'application des règles de l'OCDE au niveau mondial, raison pour laquelle il convient de suivre de près l'évolution du droit et d'examiner les conséquences pour son propre groupe. Nous vous aiderons volontiers dans cette démarche.