Discussion fiscale de l'OCDE #11 - 29 janvier 2019

Le 29 janvier 2019, le premier webinaire de la nouvelle année 2019 a eu lieu avec Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d'administration fiscales, Achim Pross, chef de la coopération internationale et de l'administration fiscale, Sophie Chatel, chef de l'unité des conventions fiscales, Sandra Knaepen, chef de l'unité des procédures amiables, et Anne Moore et Tibor Hanappi de la division Politique et statistiques fiscales.

Pascal Saint-Amans a commencé le webinaire en annonçant que le Cadre inclusif a publié aujourd'hui (29 janvier 2019) un guide sur les défis concernant les taxes dans une économie numérique dans le cadre du point d'action 1.

Les défis fiscaux de l'économie numérique (point d'action 1)

Pascal décrit cette ligne directrice comme une étape importante : alors qu'il y avait un accord dans le rapport final d'octobre 2015 sur le fait que la TVA devait être prélevée dans le pays de destination/récepteur de la fourniture/du service, il n'y avait pas d'accord entre les pays concernant l'impôt sur les bénéfices des sociétés. Certains pays étaient d'avis que la réglementation fiscale devait être révisée à cet égard, d'autres s'y opposaient et le rapport final a donc été publié sans résultat clair.

Dans le rapport intermédiaire suivant, qui a été publié en mars 2018, trois groupes de pays ont émergé :

  • Le premier groupe de pays a estimé qu'il fallait attendre le rapport prévu en 2020 et évaluer ensuite si des changements dans le système fiscal sont vraiment nécessaires. Peut-être que ce n'est pas nécessaire du tout.
  • Le deuxième groupe de pays était favorable à l'adaptation des régimes fiscaux à la nouvelle situation des entreprises hautement numérisées. Un droit d'imposition devrait être introduit pour les pays où vivent physiquement les utilisateurs de ces entreprises hautement numérisées ("concept de contribution des utilisateurs").
  • Le troisième groupe de pays (dont les États-Unis) a estimé que le problème de la numérisation ne touche pas seulement les entreprises hautement numérisées. Les modifications de la fiscalité devraient donc concerner l'économie au sens large et pas seulement le "secteur numérique".

Bien qu'il n'y ait pas eu d'accord entre ces trois groupes de pays, il a néanmoins été convenu qu'ils continueraient à travailler ensemble à une solution à long terme.

Depuis la publication du rapport intermédiaire en mars 2018, la Task Force sur l'économie numérique (TFDE), qui compte actuellement 127 membres, s'est à nouveau réunie en juillet et décembre 2018. Ces réunions ont été très fructueuses, selon Pascal Saint-Amans. Il y a eu de nouvelles idées, qui peuvent être regroupées sous deux piliers :

  1. Le premier pilier concerne l'approche nexus et la répartition des bénéfices. Quand taxer une entreprise dans ce nouveau monde numérisé ? Trois idées différentes peuvent être regroupées sous ce premier pilier :
    a. "Contribution de l'utilisateur actif" : il convient de réviser les règles actuelles relatives à l'approche "nexus" et à la répartition des bénéfices pour les entreprises fortement numérisées, de sorte qu'une telle entreprise soit imposée là où se trouve sa base d'utilisateurs actifs.
    b. "Approche immatérielle du marketing" : Cela va plus loin en disant que la création de valeur aujourd'hui se fait non seulement par les utilisateurs mais aussi par le marketing. L'État devrait donc avoir le droit de taxer là où se trouve le marché dans lequel la commercialisation a eu lieu. Cette approche devrait s'appliquer à tous les types d'entreprises, et pas seulement aux entreprises fortement numérisées.
    c. "Présence économique significative" : les pays en développement, en particulier, insistent sur le fait que les nouvelles réglementations ne doivent pas être trop compliquées, car sinon certains pays ne pourront pas les mettre en œuvre. L'objectif doit être de trouver une solution facile à mettre en œuvre.
  2. Le deuxième pilier contient une idée qui a été principalement avancée par l'Allemagne et la France. Ces pays affirment que le problème de la numérisation ne peut être abordé indépendamment des autres objectifs du site BEPS et qu'il faut avant tout s'attaquer au transfert des bénéfices. L'une des propositions de ce pilier est l'introduction d'un impôt minimum, à l'instar de la réforme fiscale américaine.

Ces quatre propositions ont été intégrées dans les lignes directrices et les États conviennent qu'elles doivent être approfondies et mieux comprises afin de trouver le plus rapidement possible une solution à long terme et consensuelle. Il existe également un consensus sur le fait que des méthodes allant au-delà du "principe de pleine concurrence" devraient être envisagées. Toutefois, cela ne doit pas conduire à une double imposition ou à une imposition en l'absence de profit économique.

Une consultation publique sur le nouveau guide aura lieu en février 2019, où toutes les parties prenantes (entreprises, gouvernements et société civile) pourront soumettre des commentaires écrits. Une réunion sera également organisée à Paris entre le 12 et le 14 mars 2019 dans le cadre de la consultation publique. À partir des résultats de la consultation, la TFDE soumettra un programme de travail détaillé au Cadre inclusif en mai 2019 et aux ministres des finances du G20 en juin 2019 sur la manière de procéder et de trouver une solution unifiée d'ici la fin de 2020.

Pratiques fiscales dommageables (point d'action 5)

Achim Pross a annoncé la publication d'un rapport de situation sur les régimes fiscaux dommageables. La diapositive suivante montre les progrès réalisés dans ce domaine :

Bucher Tax AG, Suisse, Impôts, Lucerne, Zoug, International, OCDE, BEPS, Impôts sur les bénéfices, Planification fiscale, Conseil fiscal, Entreprise, Réclamation, Déclaration fiscale, Implantation, Succession d'entreprise, Conférences, Formations, RFFA, Impôt fédéral direct, Divorce

Outre la surveillance permanente des régimes préférentiels, l'étape suivante consiste à examiner de plus près les régimes fiscaux dans lesquels l'imposition des sociétés est nulle ou très faible et ne correspond pas à la valeur réelle. L'objectif est de créer des conditions de concurrence équitables dans le monde entier.

Prévention de l'abus des accords (point d'action 6)

Un nouveau rapport sur le point d'action 6 sera publié en février 2019. Le point d'action 6 (norme minimale) souhaite que les conventions de double imposition (CDI) existantes soient modifiées de manière à ce qu'elles ne puissent pas être utilisées pour éviter l'imposition et pour mettre fin à ce que l'on appelle le "treaty shopping". Selon Sophie Chatel, le nouveau rapport montre que 65% des CDI, soit la majorité des CDI, sont modifiées dans ce sens par le biais de l'instrument multilatéral (MLI) et non par la voie bilatérale. Le rapport contient également des rapports de situation sur un total de 116 pays.

Instrument multilatéral (Action Item 15)

À ce jour, 87 pays ont signé l'instrument multilatéral (MLI), dont 19 l'ont également ratifié. Le 1er janvier 2019, l'IML est entrée en vigueur pour les 47 premiers accords.

Rapports pays par pays (point d'action 13)

Jusqu'à présent, 80 pays ont introduit des réglementations CbCR et ils essaient constamment d'améliorer le CbCR. Achim Pross a remercié les entreprises en particulier pour avoir toujours signalé les incohérences à son équipe. C'est très important. Les autorités fiscales analysent actuellement les premiers rapports par pays et l'OCDE publiera bientôt un nouveau manuel sur l'évaluation du risque fiscal effectif. En outre, un rapport majeur sur le point d'action 13 sera également publié en 2020.

Procédure d'accord mutuel (Action Item 14)

Sandra Knaepen a informé sur le point d'action 14 concernant la prévention et la résolution des conflits. Les nouvelles positives sont que dans 20 % des cas, un État peut résoudre unilatéralement le litige lui-même et que 80 % des litiges relatifs aux prix de transfert pourraient être entièrement résolus. Mais, bien sûr, il est toujours possible de s'améliorer. Les graphiques suivants des 10 premiers États, y compris la Suisse, étaient particulièrement intéressants :

Bucher Tax AG, fiscalité, Suisse, international, Lucerne, Zoug, Suisse centrale, BEPS, OCDE, impôts sur les sociétés, personne morale, conseiller fiscal, expert fiscal, planification fiscale, impôts sur les bénéfices, succession d'entreprise, déclaration d'impôts, arrêts du Tribunal fédéral

Les "statistiques MAP 2018" devraient être disponibles fin mai 2019 et publiées vers la fin de l'année 2019, a précisé Sandra Knaepen.

Statistiques sur la taxe sur les nouvelles entreprises

Anne Moore et Tibor Hanappi ont présenté les statistiques sur la taxe professionnelle recueillies en réponse au point d'action 11. La première édition des statistiques sur la taxe professionnelle a été publiée le 15 janvier 2019. Le message essentiel de ces statistiques est que l'impôt sur les sociétés reste l'une des principales sources de revenus des États, notamment dans les pays en développement. Les taux d'imposition sur les bénéfices prévus par la loi varient de 0 % à plus de 40 %. Toutefois, la tendance est à la baisse significative des taux d'imposition des bénéfices au cours des dernières décennies sur tous les continents. Toutefois, les taux légaux d'imposition des bénéfices ne sont qu'une partie de l'histoire. Tibor Hanappi a conclu en montrant des graphiques montrant comment les allègements fiscaux pour la recherche et le développement ou la patent box affectent l'impôt effectif sur les bénéfices des sociétés. Dans la prochaine édition des statistiques de l'impôt sur les sociétés, qui sera publiée au début de 2020, les données du CbCR seront également incluses.

Explorez par vous-même les statistiques de l'OCDE et comparez les différents pays entre eux.

Conclusion

Beaucoup de choses se sont passées au cours des derniers mois depuis le dernier Tax Talk #10 de l'OCDE, notamment en ce qui concerne la numérisation de l'économie. Le 15 janvier 2019, le Secrétariat d'État aux questions financières internationales (SFI) a publié une position suisse actualisée sur l'imposition de l'économie numérisée. Bien qu'il n'y ait pas encore de consensus entre les pays sur ce que devrait être la fiscalité future d'une économie numérisée, Pascal Saint-Amans et son équipe semblent très confiants quant à la possibilité de trouver un tel consensus d'ici la fin 2020. Nous sommes curieux de voir ce qui va se passer ensuite !

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